Harry Potter and the Prisoner of Azkaban
(Harry Potter et le prisonnier d'Azkaban)

Après deux premières B.O. de grande qualité, John Williams revient pour la troisième et dernière fois dans l'univers de Harry Potter. Cet épisode étant réalisé par le Mexicain Alfonso Cuaron, on quitte l'univers coloré et chaleureux instauré par Chris Columbus à qui l'on doit les adaptations précédentes. Poudlard paraît ici vieux, poussiéreux, moyen-âgeux et sale mais diablement authentique. Nos jeunes héros quittent le monde des enfants pour entrer dans celui de l'adolescence et, à terme, celui des adultes. L'intrigue elle-même est plus sombre, l'action est plus violente (le match de quidditch en est un parfait exemple et la réalisation réussit à faire ressentir au spectateur tout le danger de ce sport finalement très risqué) et le personnage de Harry y est beaucoup plus à fleur de peau.

Le film en lui-même est très réussi et se présente comme un divertissement grand public caractérisé par une certaine maturité, quoique handicapé par un scénario décousu qui ne rend pas suffisamment hommage à l'excellent roman éponyme (certaines ellipses sont tout bonnement injustifiables). Cela est cependant pardonnable grâce à une deuxième partie d'une rare intensité dans la manière dont les évènements s'enchaînent entre eux.

Cette nouvelle orientation n'a pas échappé à John Williams. Lui qui avait déjà légèrement assombri sa musique pour Harry Potter and the Chamber of Secrets, il poursuit sa lancée et livre ici des compositions inspirées un peu plus dépouillées mais d'une beauté envoûtante.

Si le célèbre 'Hedwig's Theme' ouvre le film et le CD (la piste 'Lumos!'), c'est avec une interprétation plus timorée, moins chargée et légèrement plus adulte. Et pour cause, ce célèbre motif musical se fait pour la première fois détrôner par un autre thème majeur de la partition : celui dit de 'Double Trouble', une chanson dont les paroles sont tirées du 'Something Wicked This Way Comes' du Macbeth de Shakespeare et dont l'air est repris dans plusieurs pistes du CD, notamment le très médiéval 'Hagrid The Professor', l'émouvant 'A Window To The Past' (interprété par une flûte solitaire : d'une sobriété et d'une efficacité déconcertante !), la fin du morceau 'Finale' et l'espiègle 'The Portait Gallery'.

Comme à l'accoutumée, d'autres motifs musicaux font leur apparition en plus du désormais incontournable 'Double Trouble' mais ils sont étonnamment discrets. Celui de Peter Pettigrow (joué au clavecin, ce qui est un choix judicieux pour accompagner l'apparence que ce personnage prend) se fait souvent entendre dans le film mais est assez peu présent sur l'album. Quant à d'autres, ils ne se font pas assez entendre pour être valablement retenus et fredonnés (un comble pour John Williams, le maître en matière de mélodies inoubliables !).

Cependant, cela ne nuit en rien en la richesse des orchestrations et des autres pistes du CD, certaines d'entre elles s'inscrivant dans la mouvance plus minimaliste et vaporeuse qu'a adoptée le compositeur dans la première partie des années 2000 (notamment Minority Report en 2002 et War Of The Worlds de 2005, deux films signés Steven Spielberg) sans pour autant délaisser le côté action qui s'avère ici beaucoup plus sec et abrupt que ce qu'on avait entendu dans les deux premiers épisodes. 'Quidditch, Third Year', 'The Whomping Willow', 'Lupin's Transformation and Chasing Scabbers', 'The Werewolf Scene' et 'The Dementors Converge' (avec ses chœurs) l'illustrent bien et le nombre particulièrement important de pistes est là comme pour insister sur le ton résolument ténébreux et sauvage de l'ensemble.

Heureusement, la douceur et l'humour sont également au rendez-vous. 'Aunt Marge's Waltz' est un morceau qui ne cache pas ses influences classiques et 'The Knight Bus' est déjanté à souhait avec ses rythmes jazzy, tandis que 'The Patronus Light' véhicule une incroyable sensation de pureté (le compositeur usera d'une musique similaire pour une des scènes du film The Terminal sorti en salles à peu près à la même période). Difficile aussi de passer sous silence 'Buckbeak's Flight', une scène très réussie, où Harry s'envole sur le dos d'une créature ailée : des percussions martiales endiablées le débutent pour céder la place à une très jolie mélodie aérienne évoquant à merveille le sentiment de liberté qu'éprouve notre héros pendant qu'il survole le château et le lac qui l'entoure.

John Williams s'offre même le luxe de l'expérience totale avec 'Forward To Time Past', musique intense rythmée intégralement au tic-tac d'une montre, d'une efficacité sidérante à l'écran grâce à une mise en scène intelligente (la caméra passe à travers les rouages de l'horloge de Poudlard).

L'album se conclut avec 'Mischief Managed!', sorte de medley d'une douzaine de minutes regroupant les meilleurs morceaux du CD et constituant un parfait résumé d'une oeuvre pour laquelle le compositeur a été de toute évidence très inspiré sans tomber dans le recyclage qui caractérise, dans une certaine mesure, la musique de l'épisode précédent (Harry Potter and the Chamber of Secrets).

Inventive, tonitruante, émouvante et surprenante, tels sont les adjectifs pouvant qualifier la musique de Harry Potter and the prisoner of Azkaban que beaucoup considèrent comme l'une des meilleures, si ce n'est LA meilleure, B.O. de toute la saga.